Bizarrement, la réputation de Maurice Ravel excède de très loin la réelle connaissance qu’a le public d’une œuvre qui n’est pas vraiment facile d’accès, en dépit du succès populaire du Boléro. Et cette renommée n’est pas posthume. De son vivant, Ravel fut un homme adulé internationalement, comme en témoigne le délirant hommage que lui rendirent les Etats-Unis lors de son voyage de 1928. Debussy, Fauré ou Roussel ne connurent jamais de tels succès. A cela plusieurs raisons. Dans le monde artistique du début du siècle, et encore pendant l’entre-deux-guerres, la France détient une sorte de leadership artistique. Tout ce qui s’y produit est suivi avec attention. Dans ce monde-là, Ravel offre l’avantage d’être un produit d’avant-garde, suffisamment innovant et personnel, mais pas trop (cette situation limite a bien été perçue par Erik Satie, lorsqu’il déclara, non sans malignité : « Ravel refuse la légion d’Honneur, mais toute sa musique l’accepte »). Contemporain de Schoenberg, de Stravinsky, de Bartok, Ravel s’est toujours refusé à effectuer le pas fatal qui mènerait son langage à une modernité radicale. Mieux, il revient dans certaines de ses œuvres de la maturité à une simplicité linéaire (Le Tombeau de Couperin), à une construction claire et classique (Concerto en sol), n’hésitant pas à invoquer les modèles de Mozart et de Saint-Saëns. Pour autant, on aurait du mal à le considérer comme un compositeur rétrograde ou académique. Il fut même à l’origine (bien involontairement) d’un scandale qui ébranla toute l’institution musicale.
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